La mobilité automobile est responsable d’une importante part des émissions polluantes : réduire l’impact environnemental de l’automobile constitue ainsi une priorité. Alors que plusieurs gouvernements européens ont annoncé l’interdiction des véhicules thermiques à carburants fossiles, la voiture personnelle demeure largement utilisée, surtout dans les zones à faible densité, où les distances sont longues, les alternatives rares et où le report modal n’est pas possible. Aussi, les carburants alternatifs, moins polluants, offrent une solution prometteuse.
Il existe à ce jour une diversité de carburants alternatifs, des véhicules électriques et hybrides aux biofuels, GPL et GNC, mais ils demeurent peu utilisés. Étudiant la diffusion des innovations au sein de la population, Rogers1 a conceptualisé différentes étapes au travers desquelles une innovation est adoptée. Il propose aussi une typologie de consommateurs, parmi lesquels les « early adopters », qui se mettent à utiliser une innovation dès que celle-ci est disponible.
L’adoption d’une innovation n’est pas sans contraintes pour les consommateurs (coûts économiques et pratiques). La recherche en sociologie et en psychologie sociale a montré que le changement de comportement est un processus complexe, dépendant de la socialisation, des interactions entre pairs et des normes culturelles. Celles-ci sont également associées aux technologies et infrastructures influant sur le quotidien, et à des habitudes profondément ancrées.
La forte dépendance automobile dans les territoires peu denses suggère un maintien du régime de l’automobilité durant les prochaines années. Au travers de cette étude, l’équipe R&D d’Aramco souhaite comprendre en profondeur les systèmes de normes et préférences associés au choix d’un véhicule et notamment de motorisation.
Cette recherche a pour but de définir le profil des automobilistes, de hiérarchiser les facteurs du choix de véhicule et de carburant et d’appréhender la compréhension et l’intérêt des automobilistes pour des carburants synthétiques, appelés « carburants zéro-émission ».
Bien qu’ils puissent localement émettre des polluants, comme tout véhicule thermique, les carburants liquides renouvelables peuvent être neutres en CO2 si l’énergie utilisée est renouvelable et si la quantité de CO2 émise est compensée par la quantité capturée dans l’atmosphère pour produire le carburant.
Cette étude porte sur 3 pays - France, Allemagne et Espagne - permettant une comparaison internationale.
Cette étude s’appuie sur une méthodologie mixte, permettant une compréhension complète du sujet :
Adoption d’un véhicule à carburant alternatif
Les principales motivations à l’adoption d’un véhicule à carburant alternatif sont d’ordre environnemental (générer moins d’émissions mais également renvoyer aux autres une image de soi positive) et économique (économies sur le carburant). À l’inverse, le coût d’achat élevé constitue le principal frein, avec l’autonomie limitée pour les véhicules électriques ainsi que la disponibilité du carburant. Les early adopters de véhicules à carburants alternatifs sont plus fréquemment des hommes, jeunes, urbains, avec un haut niveau de revenu et d’éducation.
Attitudes et préférences des automobilistes français, allemands et espagnols
Les attitudes subjectives des automobilistes de chacun des 3 pays ont été sondées au moyen d’échelles de Likert. Il en ressort que les automobilistes espagnols sont plus sensibles aux questions environnementales que les automobilistes français et, plus encore, allemands. Les Espagnols sont également plus intéressés par l’automobile et la technologie.
Interrogés sur leurs préférences en termes de carburants alternatifs, parmi une liste de 5 choix intégrant un carburant liquide zéro-émission fait à partir de CO2 recyclé, les automobilistes français et allemands le placent en première position, suivi par les biofuels pour les Français et l’hydrogène pour les Allemands, tandis que les Espagnols ont une préférence plus nette pour l’électrique.
Choix de véhicule et de carburant
L’analyse par préférences déclarées a permis de déterminer, toutes choses égales par ailleurs, les préférences des automobilistes dans les 3 pays. Ainsi, entre un véhicule conventionnel et un véhicule alternatif, les Français préfèrent un véhicule conventionnel et les Espagnols un véhicule alternatif, tandis qu’aucune préférence claire ne peut être observée pour les Allemands.
Choix entre un véhicule conventionnel et un véhicule à carburant alternatif
Lorsqu’ils doivent choisir entre deux véhicules alternatifs, les Français comme les Allemands préfèrent un véhicule à carburant liquide zéro-émission à un véhicule électrique, alors que les Espagnols préfèrent un véhicule électrique.
Choix entre deux véhicules alternatifs (électrique vs. carburant liquide zéro-émission)
Pour ce qui est des facteurs de choix de véhicule et de carburant, dans les 3 pays, le facteur le plus important est le prix d’achat du véhicule. En France et en Espagne, le prix du carburant est le deuxième facteur le plus important, devant la disponibilité du carburant (temps d’accès à la station). Les Allemands sont quant à eux plus sensibles au temps qu’au coût du carburant.
1Rogers EM, 2003, Diffusion of innovations. The Free Press. New York.